Ça a l’air de rien comme ça, des dents, surtout quand on ne mange plus solide, ça ne sert plus à grand chose m’opposera-t-on, sauf à parler plus distinctement, à sourire sans ressembler à une ombre effrayante.
Ça a l’air de rien comme ça, de perdre un dentier, du bas, reste toujours le haut, qui ne tient plus très bien non plus, mais ça interroge un peu, on dirait une histoire de chaussette perdue, ça inquiète aussi, comment peut-il disparaître alors que tu n’as même plus la force ni l’idée d’enlever tes dents, que je ne peux même plus te faire rire à grands coups de "Range tes dents" !
Ça a l’air de rien comme ça, de vouloir s’en foutre, de ça, de tout ce qui te grignote petit à petit, de clamer haut et fort que cela pourrait être pire, de relativiser chaque pas en arrière, de s’accrocher à la moindre parcelle qui reste encore et de céder bêtement à la tristesse pour finalement quelque chose qui ne sert (quasiment) plus à rien, de s’autoriser un peu de colère aussi, c’est comme si au 42eme km du marathon, je n’avais plus la force de franchir les 195 derniers mètres qui séparent de la ligne d’arrivée, il faut dire que cette ligne d’arrivée, je n’ai absolument aucune envie de l’atteindre, pour moi tu es encore éternelle
Ça a l’air de rien comme ça, de retrouver finalement le dit-dentier, tu étais tout simplement assise dessus, c’en est pathétiquement drôle, j’en pleure de joie, on est bête quand on aime
Ça a l’air de rien comme ça, cette petite victoire, oui, cela ressemble à vouloir sauver les apparences, il faut dire qu’il ne reste pas grand-chose d’autre, ah si, un peu, beaucoup d’amour et de sourires, avec dents !
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